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Gestion

Mode de consommation et agriculture

Si la population suisse choisissait un modèle d’alimentation préservant les ressources disponibles, la consommation de denrées alimentaires et par conséquent l’agriculture devraient changer radicalement. Est-ce que de tels changements sont imaginables ? Etat des lieux.

Dans le cadre d’une alimentation préservant les ressouces, les prairies seraient principalement utilisées par les vaches laitières...

Dans le cadre d’une alimentation préservant les ressouces, les prairies seraient principalement utilisées par les vaches laitières.

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Actualisé le

Ancienne employée, LID

Alimentation préservant les ressources

En Suisse, un idéal répandu dans la population voudrait que la production de denrées alimentaires devienne globalement plus durable. Ce serait probablement possible, à condition toutefois que les habitudes alimentaires changent. Dans le cadre du plan d’action « Economie verte » adopté par le Conseil fédéral, Agroscope s’est penchée sur la question suivante: à quoi ressemblerait, pour la population suisse, une alimentation ménageant les ressources? Agroscope a mené cette étude (disponible en allemand uniquement) sur mandat de l’OFAG. Dans le cadre de cette étude, plusieurs scénarios ont été calculés. Le résultat a été sans appel: la population devrait consommer moins de viande et, à titre de compensation, davantage de céréales, de pommes de terre ou de légumineuses, ainsi que plus d’huile et de noix. La consommation de lait resterait stable alors que celle d’alcool chuterait fortement. En parallèle, il faudrait optimiser les processus de production.

Hausse de la culture de céréales

La baisse de la consommation de viande se traduirait par une forte diminution des effectifs animaux dans l’agriculture, en particulier en ce qui concerne les porcs, les poulets de chair, les vaches mères et le gros bétail d’engraissement. Les prairies seraient principalement utilisées par les vaches laitières. Les vaches ne consommeraient pratiquement plus que des fourrages grossiers et seule les rations des vaches laitières affichant des performances élevées seraient complémentées avec du maïs grain et de l’orge. Le tourteau de soja disparaîtrait presque totalement de la ration. La majeure partie des prairies permanentes seraient exploitées de manière extensive. L’herbe pauvre en nutriments issue de ces surfaces serait distribuée à la remonte d’élevage, aux moutons et aux chèvres. Une partie des terres cultivées continuerait à être affectée aux prairies artificielles dans le cadre de la rotation, mais dans une moindre mesure qu’aujourd’hui. Au niveau des terres ouvertes, la production de céréales destinées à l’alimentation humaine augmenterait nettement. Les surfaces de pommes de terre, de légumes et de colza progresseraient également.

A la suite de la diminution des effectifs animaux (le nombre d’UGB diminuerait quasiment de moitié), la Suisse serait pratiquement capable de renoncer aux importations de fourrages. Les importations de denrées alimentaires baisseraient également. La part des denrées produites en Suisse, et donc le taux d’auto-approvisionnement en calories alimentaires, passerait de 60 % à 80 %.

La Suisse reste toutefois largement éloignée de l’optimum d’une alimentation préservant l’environnement et les ressources. Les habitudes alimentaires de la population sont totalement différentes. Aujourd’hui, même en ce qui concerne certaines denrées issues de la production animale, la Suisse n’atteint pas un taux d’au-to-approvisionnement de 100 %.

Importations de fourrages

La future politique agricole présentée en novembre 2017 par le conseiller fédéral Schneider-Ammann dans sa vision globale va dans une direction totalement opposée. Selon le conseiller fédéral, les agriculteurs suisses doivent devenir plus compétitifs et les denrées alimentaires meilleur marché. Les prix de la viande en particulier, qui sont près de deux fois plus élevés en Suisse qu’à l’étranger, devraient être réduits. Les conséquences d’une baisse du prix de la viande sont évidentes: elle doperait la consommation. Ce sont surtout les achats de morceaux nobles qui augmenteraient. Au lieu de garnir son sandwich avec du fromage d’Italie, le consommateur utiliserait du filet. Ce modèle ne ressemble en rien à une consommation préservant les ressources.

Si les droits de douane baissaient, comme l’envisage le Conseil fédéral, le prix des denrées alimentaires chuterait de 5 à 25 %. Le prix du soja baisserait lui aussi. Les agriculteurs qui souscrivent à une logique économique devraient alors importer davantage de fourrage. Si l’on en croit les médias, cette évolution serait contraire aux souhaits de la population. Les agriculteurs seraient encore plus critiqués et la population serait peut-être moins encline à financer les paiements directs.

Conséquences des importations

Les importations de fourrages n’augmenteraient toutefois que pour autant que la production de lait, de viande et d’œufs soit économiquement rentable en Suisse. A partir du moment où ce ne serait plus le cas, ce ne sont pas les importations de fourrages qui augmenteraient mais bien les importations de viande, d’œufs et de produits laitiers.

L’impact environnemental serait par conséquent reporté sur des pays étrangers pratiquant un mode de production agricole bien souvent très différent du modèle suisse. Aujourd’hui déjà, on sait que la charge environnementale découlant des importations de denrées alimentaires est trois fois supérieure à celle des importations de fourrages. Dans le débat public, les conséquences environnementales des importations de denrées alimentaires sont un sujet qui n’est pratiquement jamais abordé. Pourtant ces importations concernent beaucoup plus de monde que les seules 50 000 familles paysannes suisses. Une modification du système nutritionnel pratiqué en Suisse impliquerait également que la population, l’économie et la politique soit prêts à s’y conformer. Or cela semble difficilement possible, voire impossible. 

AuteureEveline Dudda, service d’information agricole LID, Weststrasse 10, 3000 Berne 6, www.lid.ch

« Pour le moment, les agriculteurs n’ont pas besoin de réagir. »

Revue UFA: De votre point de vue, quel est le principal enseignement à tirer de l’étude d’Agroscope ?

Thomas Nemecek: Une alimentation optimisée quant à son impact sur l’environnement permettrait de réduire de moitié les conséquences de l’alimentation sur l’environnement. Pour que cela soit le cas, notre mode d’alimentation devrait toutefois être profondément modifié. L’agriculture suisse se focaliserait davantage sur la production de denrées alimentaires d’origine végétale et sur la production laitière. Dans le même temps, la baisse des importations de denrées alimentaires et de fourrages augmenterait nettement le taux d’auto-approvisionnement.

Les agricultrices et les agriculteurs doivent-ils réagir à cette étude ?

T. Nemecek: Non, pour le moment, les agriculteurs n’ont pas besoin de réagir. L’objectif de cette étude consiste à estimer quel serait le potentiel de réduction des impacts environnementaux et à déterminer le mode d’alimentation susceptible de permettre une telle réduction.

Dans quelle mesure est-il vraisemblable que la population se nourrisse de façon à préserver au maximum l’environnement et à quel horizon une telle transition pourrait-elle s’opérer ?

T. Nemecek: L’étude mandatée par l’Office fédéral de l’agriculture devait permettre de démontrer à quoi ressemblerait, en Suisse, un modèle d’alimentation ayant pour objectif de réduire les impacts environnementaux de l’alimentation tout en respectant les recommandations en matière d’alimentation et en utilisant l’ensemble de la surface agricole utile suisse pour produire des denrées alimentaires. Notre étude ne se prononce pas sur le modèle de consommation de la population.

Interview: Gabriela Küng, Revue UFA, 8401 Winterthour L’interview a été réalisée par écrit.

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