Le succès économique de la production laitière ne dépend pas seulement du revenu tiré des ventes de lait mais également des coûts de production. Outre les coûts d’affouragement, de bâtiments et de travail, la santé et la fertilité des vaches sont des facteurs de rentabilité importants. Un mode de détention approprié et un affouragement optimal contribuent à réduire les coûts de santé et de fertilité. L’amélioration génétique des caractères de fitness permet quant à elle d’abaisser durablement les frais vétérinaires.
Faible héritabilité en raison de mesures imprécises
L’héritabilité souvent faible des caractères de fitness semble être un obstacle à leur amélioration génétique. Une faible héritabilité ne signifie toutefois pas que la manifestation d’un caractère n’est pas influencée par le patrimoine génétique (les gènes) et qu’il n’y ait par conséquence aucun potentiel d’amélioration génétique. En fait, l’héritabilité n’indique que le degré de précision avec lequel le potentiel génétique d’un animal peut être déterminé sur la base d’une seule observation. Pour les caractères de fitness, l’échelle d’observation est souvent relativement grossière. On constate uniquement si une insémination a été un succès ou non, si un veau est né vivant ou non, ou si une vache a été traitée ou non contre une maladie donnée. C’est un peu comme si on mesurait la hauteur au sacrum d’une vache à l’aide d’un mètre dont la graduation n’indiquerait que les mètres. Avec un tel instrument de mesure, la répartition des hauteurs effectives serait occultée par le mode de saisie imprécis. Mesurer de cette façon un grand nombre de vaches permettrait malgré tout d’évaluer leur hauteur moyenne de manière relativement précise. A cause de la grande inexactitude des mesures, l’héritabilité d’une appréciation aussi grossière de la hauteur au sacrum serait certes nettement inférieure à la normale. Cela ne changerait cependant rien au fait que la prédisposition génétique pour la hauteur au sacrum se transmet à la prochaine génération.
Phénotype et génotype
Outre la précision des mesures, des facteurs de milieu systématiques, comme l’affouragement et le mode de détention, influencent eux aussi l’héritabilité d’un caractère. A l’aide de l’estimation de la valeur d’élevage (EVE), on essaie de distinguer l’impact de l’environnement sur l’expression d’un caractère (phénotype) par rapport à l’impact de la génétique (génotype). Plus on arrive à décrire précisément le milieu au sein duquel une performance a été réalisée et plus on peut corriger son impact. L’héritabilité d’un caractère est moins décisive pour le succès d’élevage que le degré de précision des valeurs d’élevage estimées sur cette base. Pour les taureaux, on peut aussi obtenir des valeurs d’élevage sûres pour des caractères présentant une faible héritabilité en observant un nombre de descendants suffisant. Cela s’applique à la plupart des caractères de fitness, comme dans l’exemple de la mesure grossière de la hauteur au sacrum. L’enregistrement des résultats d’insémination sur plusieurs années permet de disposer d’une excellente base de données pour l’EVE fertilité.
Caractères auxiliaires
Il en va différemment pour les caractères de santé. S’agissant de ces derniers, la base de données provenant des journaux de traitement électroniques des organisations d’élevage est encore un peu juste. Les caractères auxiliaires basés sur les taux cellulaires permettent malgré tout d’obtenir des valeurs d’élevage (VE) assez fiables pour la résistance aux mammites. C’est encore plus vrai pour le caractère de la résistance à la cétose, pour lequel Qualitas a développé une EVE. Cette dernière se base sur les caractères auxiliaires rapport graisse-protéine et concentration en acétone dans le lait ainsi que sur la concentration en acides gras non estérifiés (AGNE) dans le sang. Les AGNE sont un indicateur de mobilisation des graisses. Leur concentration dans le sang est déterminée à partir du lait. Cela nécessite des équations prédictives basées sur les données spectrales MIR du lait obtenues lors des analyses en laboratoire réalisées dans le cadre du contrôle laitier. Actuellement, l’EVE résistance à la cétose est encore en phase de validation. La nouvelle valeur d’élevage ne sera probablement publiée officiellement que lorsqu’une EVE génomique sera aussi réa lisable.
Sélection génomique
Pour les autres caractères de fitness comme la fertilité, la sélection génomique fonctionne assez bien pour des populations importantes. Disposer de valeurs d’élevage relativement sûres permet de prendre des décisions de sélection à un stade plus précoce dans la vie d’un animal qu’en se basant sur les seules valeurs d’élevage selon l’ascendance. Cela contribue à diminuer les frais d’élevage et permet aussi, en recourant de manière ciblée à des doses sexées et des inséminations avec des taureaux d’engraissement, une intensité de sélection plus élevée pour les animaux femelles.
Lorsque l’on utilise des jeunes taureaux génomiques, il convient de répartir les risques sur plusieurs taureaux.
Pour les animaux mâles, cela autorise par ailleurs des intervalles intergénérationnels nettement plus courts que si la plupart des inséminations s’effectuaient avec des taureaux testés selon la descendance. Lorsque l’on utilise des jeunes taureaux génomiques, il faut être conscient que les résultats sont moins sûrs qu’avec le testage par la descendance. En choisissant des taureaux d’insémination pour inséminer son troupeau, il ne faut pas tout miser sur la même carte et répartir les risques sur plusieurs jeunes taureaux correspondant au but d’élevage de l’exploitation.
Utiliser les valeurs d’élevage globales
Le nombre élevé de valeurs d’élevage et les changements fréquents au niveau de l’offre en taureaux d’IA font que l’éleveur perd rapidement la vue d’ensemble au moment de choisir des taureaux adaptés à ses besoins. Les valeurs d’élevage globales (VEG, ISET) sont une aide bienvenue, les différents caractères étant englobés dans une seule valeur en fonction de leur importance économique. Les éleveurs qui souhaitent accorder plus d’importance aux caractères de fitness peuvent sélectionner les taureaux les mieux adaptés de manière simple, en se basant sur leurs valeurs d’élevage partielles (FIW, IFF). Pour les troupeaux plus grands en particulier, il est recommandé d’utiliser la fonction pour plan d’accouplement disponible sur les sites Internet des fédérations d’élevage.