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Production végétale

Plus de peur que de mal

Certaines substances actives chimiques de synthèse destinées au traitement des semences ne sont plus autorisées. Les exploitations de grandes cultures craignent que des maladies transmises par les semences redeviennent problématiques. Lors de la certification des semences, ces maladies sont détectées au moyen de tests sanitaires, lesquels permettront de déceler une éventuelle future augmentation.

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(pixabay.com)

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Rédactrice Revue UFA

     

Quelques substances actives chimiques de synthèse utilisées pour le traitement des semences ont déjà été bannies. Plusieurs pourraient aussi être retirées de la circulation. Dans certaines cultures, telles que la betterave sucrière, l’interdiction des néonicotinoïdes a provoqué une flambée de jaunisse virale dans plusieurs régions. L’évolution de la situation dans les autres cultures si d’autres substances actives devenaient interdites est incertaine. Dans les céréales, on pourrait assister à la réapparition de « vieilles maladies », c’est-à-dire de maladies qui avaient pratiquement disparu depuis l’introduction du traitement des semences. Les maladies transmises par les semences, notamment, sont difficiles à maîtriser et mondialement importantes. Irene Bänziger, collaboratrice techno-scientifique chez Agroscope sur le site de Reckenholz (ZH), s’occupe depuis trois décennies des agents pathogènes transmis par les semences dans le cadre des tests sanitaires pour la certification des semences non traitées. Elle a brossé, pour la Revue UFA, un tableau de la situation et montré ce qu’il est possible de faire pour empêcher une dissémination.

Une importante vague de dissémination ne semble pas à l’ordre du jour.

Les maladies recherchées

Avec les tests sanitaires, Irene Bänziger recherche les maladies économiquement importantes qui sont transmises par les semences, à savoir la carie commune (Tilletia caries,syn. T. tritici), la carie naine (Tilletia controversa) et la moisissure des neiges (Microdochium nivale / M. majus). Un système de seuil de tolérance, qui sert de base à la certification, existe pour chacune de ces maladies. Pour l’analyse de la moisissure des neiges, on fait germer des graines sur du papier filtre. Le développement d’une moisissure rouge-rose blanchâtre ou d’une plantule aux racines brunies et rabougries indique que la semence est infectée par ce pathogène. Pour détecter les caries (naine et commune), les graines sont trempées dans une solution qui est ensuite filtrée. Le nombre de spores de carie présentes sur le filtre est ensuite déterminé sous le microscope. Le charbon nu de l’orge (Ustilago nuda) est aussi contrôlé, mais au champ (visites de cultures). L’agent responsable de cette maladie s’installe profondément à l’intérieur du grain, dans l’embryon. « Un test en laboratoire serait très laborieux, car 2000 embryons devraient être contrôlés », explique Irene Bänziger. Sur le champ, par contre, les épis infectés, de couleur noire, sont bien visibles durant la floraison. La scientifique a bon espoir que des méthodes moléculaires permettront prochainement une analyse plus rapide, et ce aussi pour les spores dans le sol.

Battre une culture contaminée aggrave le problème.

Autre culture, autre problème

Quelles maladies sont problématiques, et dans quelles cultures ? En 30 ans, Irene Bänziger a testé de nombreux échantillons de semences. « De plus en plus de semence IP-Suisse venant s’ajouter au bio, nous traitons environ 600 lots par saison », explique-t-elle. Elle se montre aussi rassurante en indiquant que ces dernières années, seules quelques lots non traités ont dépassé les seuils de tolérance des maladies importantes. Une importante vague de dissémination ne semble donc pas à l’ordre du jour. En outre, des contrôles très stricts sont réalisés pour toutes les classes de semences. La scientifique sait malgré tout que quelques maladies sont plus fréquentes dans certaines cultures. Le charbon nu touche ainsi surtout l’orge, tandis que la carie commune représente un problème plus important dans le blé et l’épeautre. La moisissure des neiges est plutôt problématique dans le triticale et le seigle, car elle diminue la faculté germinative.

Déroulement d’une contamination

Les spores de la carie commune se déposent sur l’enveloppe extérieure du grain et germent en même temps que les semences. A ce moment-là, les conditions météorologiques peuvent encore jouer en faveur de l’agricultrice ou l’agriculteur, car le pathogène a besoin de conditions plutôt sèches et de températures comprises entre 5 et 10 °C durant la germination de la plante. Toutefois, la carie naine se transmet aussi par le sol et germe déjà par un temps plus froid ; la plante est donc contaminée durant le tallage. Lorsque la plante est infectée, elle forme, pour les deux maladies, des grains cariés durant le stade pâteux. L’odeur de poisson qui se dégage de ces amas de spores noirs est très marquante. Ce n’est toutefois pas l’odeur qui est problématique, mais le fait que les lots contaminés sont toxiques et donc impropres à la consommation. Si seuls quelques épis sont touchés, ils peuvent être éliminés manuellement. Battre une culture contaminée aggrave le problème. Les spores parviennent alors sur le sol ainsi que sur les grains sains et les infectent. Les machines et les lieux de stockage sont aussi contaminés. Le charbon nu de l’orge entraîne aussi la formation d’amas de spores noires à la place des grains. Les spores, qui sont dispersées par le vent et la pluie, infectent les plantes saines déjà durant la floraison. Elles parviennent ainsi dans l’embryon du grain durant la formation de celui-ci et le champignon s’y développe. Une parcelle fortement contaminée subit généralement des pertes de rendement élevées. La moisissure des neiges a besoin de températures fraîches et d’une humidité de l’air élevée. Le champignon diminue alors la faculté germinative du grain en cours de développement et les peuplements sont lacunaires.

Protéger les semences bio

Bien que les seuils de tolérance ne soient que rarement dépassés, les semences qui ne sont pas traitées avec des produits chimiques de synthèse ont tendance à être contaminées par des maladies. Ce sont surtout la multiplication pour ses propres besoins ou les anciennes variétés qui ne sont pas multipliées pour des organisations de producteurs de semences qui sont problématiques. De plus, les distances entre les surfaces sont souvent faibles, ce qui favorise aussi une propagation. On recommande aux exploitations d’envoyer quelques échantillons (voir infobox). Les moulins envoient aussi des céréales bio pour analyse lorsqu’ils soupçonnent une contamination. Actuellement, les alternatives aux traitements chimiques de synthèse se font rares. Autrefois, on pouvait utiliser le produit « Tillecur » (à base de farine de moutarde) pour lutter contre la carie commune, mais ce produit n’est plus autorisé en Suisse. Un traitement avec Cerall ou Cedomon (bactérie du genre Pseudomonas) a un effet partiel contre les caries, mais il diminue l’aptitude à la conservation des semences. Ces traitements ne sont d’aucune utilité contre le charbon nu, car le pathogène s’installe profondément dans le grain. Un traitement à l’eau chaude peut aider, mais n’est pour l’instant pas applicable à grande échelle en raison de la logistique et des coûts énergétiques élevés. Enfin, le développement de ThermoSeed offrira à l’avenir une bonne possibilité pour le prétraitement des semences. Agroscope et fenaco ont étudié et fait avancer ensemble ce procédé, qui consiste à exposer la surface des semences durant quelques minutes à de la vapeur, qui tue les agents pathogènes. L’installation permet de traiter 15 tonnes de semences par heure. Ce procédé ne fonctionne toutefois pas pour le charbon nu, car la vapeur ne pénètre pas assez profondément dans le grain.

Informations supplémentaires sur le traitement ThermoSeed : www.fenaco.com  Rechercher ThermoSeed

 

Agir de manière proactive

Voici quelques conseils d’Irene Bänziger pour contribuer à empêcher la dissémination des charbons.

• N’utiliser que des semences certifiées.

• En faibles quantités, les épis cariés peuvent être éliminés.

• Ne pas prévoir de rotations trop chargées (céréales).

• En cas de contamination par la carie commune ou naine, passer éventuellement à la culture d’orge, car cette dernière n’est pas touchée.

• Les céréales de printemps sont généralement moins sensibles à la carie commune et ne sont pas affectées par la carie naine car, en raison des températures plus élevées, les plantes poussent plus vite après le semis et les spores de carie naine ne germent plus.

• Le risque peut être réduit avec la date de semis. Il faut semer les céréales d’automne aussi tôt que possible ou très tard et semer les céréales de printemps plutôt tard (développement rapide des plantes).

• Il vaut la peine d’envoyer des échantillons de semences multipliées pour un test sanitaire.

• En ce qui concerne le charbon nu de l’orge, les variétés à floraison fermée sont moins menacées. 

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